Les aventures musicales de deux potes

Les aventures musicales de deux potes

mercredi 6 décembre 2017

Baxter Dury - Prince Of Tears (2017)

  Après un It's A Pleasure bon mais un décevant, comme un Happy Soup fatigué, triste mais pas dans le bon sens et globalement moins inspiré, j'ai été très, très content de retrouver le Baxter Dury que j'aime depuis ses débuts avec ce disque. Pour le coup, le disque est assez proche de Happy Soup dans l'ensemble, toujours ces énormes lignes de basse métronomiques et catchy à souhait, ces claviers pop et ces choeurs féminins. Et évidemment, ce chanté-parlé de crooner de fond de pub. Mais c'est bien fait, et avec un ingrédient accentué tout au long du disque et justifié par la tonalité plus émouvante des textes ayant inspiré le LP (une séparation, cf le titre) : les cordes. Beaucoup plus étoffées et subtiles qu'auparavant, avec une densité quasiment gainsbourgienne qu'ont relevé avec justesse beaucoup de gens. Comme sur la parfaite chanson titre, "Prince Of Tears", à mi chemin entre Melody Nelson/L'Homme à Tête de Chou et le style des deux derniers albums de Dury. Et ces cordes, de manière générale, font vraiment la différence, ce sont elles par exemple qui font le sel et la montée de tension de "Miami", en flirtant entre l'orchestration néo-classique et le disco. 

Baxter Dury - Prince Of Tears (Clip, 2017)

Baxter Dury - Miami (Clip, 2017)

  Mais elles sont loin d'être la seule bonne idée musicale du disque, les guitares funky de la fin de "Miami" justement, sont divines, comme le piano du début de "Porcelain" ou les interventions de synthé crépusculaires tout au long du morceau. Il a également la riche idée sur cette chanson de s'éclipser devant Rose Elinor Dougall, et de manière générale de laisser la place à de sompteux choeurs et chants féminins pour ne pas laisser son flow addictif mais monocorde lasser et garder intact tout le charme de son humour british et de sa diction percutante. On pourrait imaginer que Dury est le sujet de cette chanson, tant les paroles "Porcelain Boy / You're just a lonely motherfucker / Porcelain Boy / I Don't Give A Shit About You" lui semblent destinées d'un point de vue féminin dans le contexte d'une séparation.

  Un autre élément remarquable, la qualité des transitions. Cet album est admirablement séquencé. On a un crescendo de tension sur les deux premiers titres, aboutissant à un moment réellement déchirant, dissipé par le plus léger musicalement (et vocalement, Dury chante ici davantage qu'il ne déclame, et d'une voix moins grave) sur "Mungo". Le petit solo de guitare décalé à la Connan Mockasin ajoute au côté plutôt fantaisiste cette chanson douce-amère qui balance allègrement entre le rigolo et l'émouvant, parfois au détour d'un arrangement orchestral (comme juste avant la fin du morceau, avec ce mantra chanté : "Please don't call me..."). Le côté marrant est bien présent sur la très surréaliste "Almond Milk", avec une intervention on ne peut plus british de Jason Williamson des Sleaford Mods avec lesquels Baxter partage, outre son côté irrépressiblement anglais, un sens de la concision pop et un amour de la répétition en général. Qu'on retrouve sur le punky et fun "Letter Bomb". On croirait d'ailleurs presque entendre un disque de Blondie sous gaz hilarant à plusieurs reprises.


  Et puis sur les morceaux les plus rock (au sens large) comme "Listen", on entend le pub-rock sans limites de son papa Ian Dury, cet héritage étant complètement assumé (y'a même un court solo de guitare) et merveilleusement fusionné avec son style propre. Le refrain notamment est merveilleux, entre rythmique sautillante presque Motown, basse élastique, guitare insistante et chant féminin irrésistible merveilleusement produit et magnifiquement souligné par les cordes. Dans le genre, "Oi" a un aspect sixties, dans le sens variété américaine ambitieuse influencée par les musiques de western futuristes de Joe Meek et la country orchestrale de Lee Hazlewood. Un très bon morceau encore une fois. Et, comme je l'ai déjà évoqué, si Dury a le sens de la concision (cf la durée des morceaux et de l'album), il a aussi le don de mettre de petites interventions musicales pertinentes et renouvelant sa palette, ici ce sera donc des guitares très américaines et surtout un orgue étonnant. 

  Les claviers, on en retrouve de très bons sur la très délicate "August", dans une alchimie parfaite avec les cordes hyper mélodieuses (rejouées au clavier pour la plupart), la section rythmique tranquille et les guitares métronomiques. Et après avoir évoqué la Motown, c'est aux instrumentations chaudes et spartiates de Stax qu'on va penser à l'écoute de "Wanna", version très personnelle de la soul sixties de notre Droopy britannique.

  Vous l'aurez compris, c'est un coup de maître, Baxter Dury a largement égalé ses standards de qualité, et ça fait très plaisir. C'est court, bon, efficace, sans moment plus faible, constamment bon dans l'émotion comme dans l'humour, un sans faute.


Alex


2 commentaires:

  1. Un album génial, mon préféré de Baxter, même si j'avais adoré aussi It's a Pleasure.
    Y a quelques perles absolues sur ce disque, de Miami au morceau-titre Prince of Tears qui constitue un "tube pour enterrement" en puissance. Et le Almond Milk avec Jason Williamson est énorme de second degré (j'étais étonné que ces deux-là s'apprécient, mais comme tu le dis, ils partagent finalement beaucoup, de cet amour pour la répétition à l'aspect caustique et désabusé sur le monde extérieur).

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    1. Merci pour ton commentaire !
      J'en attendais beaucoup trop de ce It's a pleasure je pense car tout ce qu'il avait fait avant m'avait vraiment beaucoup plu et que la direction pop de happy soup était prometteuse. Faut que je le réécoute avec le recul je le réévaluerais peut être !
      Merci pour ton commentaire ! :)

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